Dans le contexte professionnel actuel, où de nombreux salariés passent de longues heures dans des postures statiques ou à effectuer des gestes répétitifs, les douleurs musculo-squelettiques (TMS) sont devenues l’un des enjeux majeurs de la santé au travail. Parmi les origines de ces douleurs, les trigger points — ou points gâchettes myofasciaux — sont souvent méconnus, mal diagnostiqués, mais extrêmement répandus.

Ces points, petits mais redoutables, peuvent causer des douleurs chroniques, des limitations fonctionnelles, de la fatigue, et même de l’absentéisme. Comprendre leur fonctionnement, leur origine, et leur impact sur les salariés permet d’améliorer considérablement la qualité de vie au travail, tout en réduisant les coûts liés aux troubles musculo-squelettiques.

Qu’est-ce qu’un trigger point ?

Un trigger point est une zone localisée d’hyperirritabilité dans une bande tendue de muscle squelettique. En d’autres termes, il s’agit d’un nodule ou d’un point dur dans une fibre musculaire contractée, souvent douloureux à la palpation, et pouvant provoquer des douleurs référées, c’est-à-dire ressenties à distance du point lui-même.

Ces points se forment souvent dans les muscles surutilisés, traumatisés ou soumis à des postures prolongées. Par exemple, un salarié travaillant sur ordinateur plusieurs heures par jour peut développer des trigger points dans les trapèzes, les muscles cervicaux ou les avant-bras.

On distingue généralement deux types de trigger points. Les points actifs provoquent une douleur spontanée, même au repos, souvent ressentie dans une autre zone du corps que celle du point d’origine. Les points latents, quant à eux, ne déclenchent pas de douleur spontanée, mais sont sensibles à la pression et peuvent altérer la fonction musculaire sans symptôme apparent.

Comment se forment les trigger points ?

La formation d’un trigger point est liée à un ensemble de facteurs, souvent combinés. L’une des causes majeures est la surcharge musculaire, qu’elle soit due à des efforts physiques intenses, prolongés ou à des gestes répétitifs. Les postures prolongées ou inadaptées, comme la station assise devant un écran sans pauses régulières, favorisent aussi l’apparition de ces points. Le stress psychologique joue également un rôle déterminant, car il entraîne des tensions musculaires chroniques susceptibles de créer des trigger points.

Par ailleurs, les microtraumatismes répétés, le manque d’activité physique, la sédentarité, la fatigue généralisée, un sommeil de mauvaise qualité, une mauvaise hydratation ou encore des déséquilibres nutritionnels peuvent participer au développement de ces points douloureux. Tous ces éléments s’intègrent dans un cercle vicieux : la douleur induite par le trigger point limite le mouvement, ce qui affaiblit le muscle et favorise la formation de nouveaux points.

Symptômes associés aux trigger points

Les symptômes causés par les trigger points sont souvent déroutants, car la douleur n’apparaît pas toujours à l’endroit du point lui-même. La douleur peut être diffuse ou localisée, parfois projetée dans une autre zone du corps, ce qui complique le diagnostic. Une raideur musculaire persistante, une faiblesse musculaire sans signe visible d’atrophie, des sensations d’engourdissement ou de picotements peuvent également apparaître, notamment si un nerf est comprimé par une zone musculaire contractée.

La limitation de l’amplitude de mouvement est fréquente, tout comme les maux de tête, notamment ceux d’origine cervicale. Enfin, de nombreuses personnes rapportent une fatigue chronique, une sensation de lourdeur ou d’épuisement musculaire, même sans activité physique importante.

Diagnostic des trigger points

Le diagnostic repose principalement sur l’examen clinique effectué par un professionnel formé à leur détection, comme un médecin du travail, un kinésithérapeute ou un ostéopathe. Ce professionnel palpera les muscles à la recherche de bandes tendues et douloureuses, capables de déclencher une douleur caractéristique à la pression. Ces douleurs peuvent parfois reproduire exactement les symptômes que ressent le salarié au quotidien.

À ce jour, l’imagerie médicale standard (IRM, échographie) ne permet pas de visualiser directement les trigger points, bien que certaines avancées techniques récentes explorent cette possibilité à des fins de recherche.

Impact des trigger points sur les salariés en entreprise

Les trigger points, en tant que source fréquente mais souvent ignorée de douleur chronique, ont un impact direct sur la santé physique et mentale des salariés, ainsi que sur leur performance professionnelle. Lorsqu’un salarié est confronté à une douleur persistante, sa capacité de concentration diminue, son efficacité se réduit et il peut être contraint d’adopter des compensations corporelles qui entraînent d’autres douleurs.

La productivité est souvent affectée, car la douleur réduit la tolérance à l’effort et augmente la fatigue. Dans de nombreux cas, les douleurs provoquent des arrêts de travail. Ces arrêts, souvent catégorisés comme des troubles musculo-squelettiques, représentent une part importante des maladies professionnelles reconnues. Le coût pour l’entreprise est alors double : perte de main-d’œuvre, mais aussi coût des indemnités et remplacements.

Même en l’absence d’arrêt maladie, le présentéisme douloureux est courant : les salariés continuent de venir travailler tout en étant diminués physiquement, ce qui peut entraîner des erreurs, des accidents et une ambiance dégradée. Sur le plan psychologique, la douleur chronique provoquée par les trigger points altère la qualité du sommeil, favorise l’irritabilité, l’anxiété, voire des épisodes dépressifs, surtout si le mal-être est incompris ou minimisé dans l’environnement de travail.

Profils professionnels à risque

Certaines catégories de salariés sont plus exposées aux risques liés aux trigger points en raison de la nature de leur activité. Les employés de bureau, par exemple, sont particulièrement touchés, car ils adoptent souvent des postures fixes prolongées avec peu de pauses. Les travailleurs à la chaîne effectuent des gestes répétitifs tout au long de la journée, sollicitant intensément certains groupes musculaires.

Dans le secteur de la santé, les infirmiers et aides-soignants manipulent des charges lourdes et adoptent fréquemment des postures contraignantes. Les enseignants passent de longues heures debout, souvent avec un usage vocal intensif, ce qui peut aussi entraîner des tensions musculaires dans la nuque et le cou. Les chauffeurs professionnels, exposés à la fois à l’immobilité, aux vibrations et au stress, développent fréquemment des douleurs lombaires ou cervicales. Enfin, les métiers physiques comme ceux du bâtiment ou de la restauration comportent une intensité musculaire importante, propice à la formation de ces points douloureux.

Prévention et solutions en entreprise

La prévention des trigger points repose avant tout sur une meilleure organisation du travail, une sensibilisation des salariés, et un accompagnement adapté. L’un des leviers les plus efficaces est l’amélioration de l’ergonomie des postes de travail. Cela comprend l’ajustement de la hauteur du siège, la disposition de l’écran à hauteur des yeux, le placement optimal du clavier et de la souris, ainsi que le soutien lombaire pour la chaise.

Les micro-pauses régulières sont également fondamentales. Il est recommandé d’inciter les collaborateurs à se lever, bouger et s’étirer toutes les 30 à 60 minutes. Ces pauses ne nécessitent que quelques secondes mais réduisent considérablement l’accumulation de tension musculaire. Des programmes d’étirements simples, centrés sur les zones sensibles comme les trapèzes, le cou, les épaules ou les avant-bras, peuvent être proposés sur site ou en ligne.

Former les salariés à adopter les bons gestes et postures, notamment lors du port de charges ou lors d’activités répétitives, est également une mesure préventive essentielle. Certaines entreprises vont plus loin en proposant des séances de massage ou en facilitant l’accès à des soins de kinésithérapie ou d’ostéopathie. Ces soins permettent de désactiver les trigger points et de rétablir une fonction musculaire normale.

Enfin, encourager la pratique régulière d’une activité physique, même modérée, renforce les muscles et favorise une meilleure posture. Des activités comme le yoga ou la relaxation peuvent aussi être intégrées dans une démarche de qualité de vie au travail, notamment pour mieux gérer le stress, qui est un facteur aggravant des tensions musculaires.

L’apport de Santé Formation

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Les trigger points représentent une cause fréquente, mais trop souvent sous-estimée, des douleurs chroniques en entreprise. Leur présence impacte non seulement la santé des salariés, mais aussi l’efficacité opérationnelle et l’ambiance de travail. En agissant sur les causes — qu’il s’agisse de postures, de stress ou de mauvaises habitudes musculaires — les entreprises peuvent réduire leur prévalence, améliorer le bien-être au travail et diminuer les coûts liés aux TMS.

Mettre en place une politique de prévention adaptée, centrée sur l’ergonomie, le mouvement, l’écoute et l’accompagnement, constitue un levier puissant de performance durable et de qualité de vie au travail.

Sources et informations complémentaires

Sources médicales et scientifiques

Travaux du Dr Janet Travell et Dr David Simons

  • Travell & Simons’ Myofascial Pain and Dysfunction: The Trigger Point Manual (2 volumes)
  • Ouvrage de référence sur la découverte et la cartographie des trigger points dans le corps humain.

National Institutes of Health (NIH)

  • Articles publiés sur la douleur myofasciale et le syndrome des points gâchettes.
  • Ex. : NIH – Myofascial Pain Syndrome
  • Revue de la littérature scientifique sur les causes, symptômes et traitements.

Cochrane Database of Systematic Reviews

  • Études sur l’efficacité des traitements (massage, acupuncture, dry needling, kinésithérapie) des trigger points.
  • Exemple : Acupuncture and dry needling for myofascial trigger point pain.

PubMed

  • Articles cliniques sur le lien entre stress, sédentarité et apparition de trigger points.
  • Études sur la physiopathologie musculaire et les douleurs référées.

Sources professionnelles en santé au travail

INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité – France)

  • Fiches sur les TMS, la prévention des douleurs musculaires en milieu professionnel.
  • Site : www.inrs.fr

Assurance Maladie – Risques professionnels

  • Données sur la part des TMS dans les maladies professionnelles reconnues.
  • Statistiques sur les arrêts de travail liés aux troubles musculo-squelettiques.
  • Site : ameli.fr

ANACT (Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail)

  • Publications sur la prévention des risques liés à la posture, la charge mentale et les douleurs au travail.

  • Site : www.anact.fr

Ergonomie et bien-être au travail

Organisation Mondiale de la Santé (OMS)

  • Recommandations sur les conditions de travail saines, l’ergonomie et la lutte contre la sédentarité.
  • Documents sur les effets du stress et de la posture prolongée sur la santé.

Ergonomie pratique – Alain Wisner, François Daniellou

  • Ouvrages sur l’ergonomie appliquée en entreprise et la prévention des troubles liés à l’activité physique.

Revue « Le Journal de l’Ergonomie »

  • Articles sur l’adaptation des postes de travail, la biomécanique et la prévention des douleurs musculaires.

Article partiellement rédigé avec l’aide de l’intelligence artificielle